FRANCE COMPETENCES reconduit majoritairement les opérateurs régionaux sur 2024-2027

Publié le 07 novembre 2023


Le futur paysage des opérateurs régionaux du conseil en évolution professionnelle des actifs occupés pour la période 2024-2027 prend forme. Il ne devrait pas fondamentalement changer selon les délibérations prises par le conseil d’administration de France compétences le 5 octobre 2023. Les principaux attributaires des différents lots régionaux restent les mêmes, même si les CIBC voient leur rôle renforcé dans plusieurs consortiums d’acteurs alors que de nouveaux entrants émergent. Un appel d’offres qui a par ailleurs dû être ajusté en cours de route.


Le conseil d’administration de France compétences a validé, jeudi 5 octobre 2023, les résultats de l’appel d’offres lancé en début d’année pour renouveler les opérateurs régionaux du CEP des actifs occupés (lire sur AEF info). Ses délibérations viennent d’être mises en ligne sur le site de l’institution publique chargée du financement et de la régulation du système de formation professionnelle, vendredi 27 octobre. Elles portent sur l’attribution de 15 des 16 lots du marché public du CEP des actifs occupés, le lot relatif à la "sécurisation du dispositif dans les Drom" a en effet été infructueux faute d’offre reçue par France compétences.

PROCÉDURE ENCORE EN COURS

Si les nouveaux opérateurs du CEP des actifs occupés doivent prendre le relais de ceux désignés en 2019 dès le 2 janvier 2024, les différents lots ne sont, pour le moment, attribués qu’à titre provisoire. La procédure d’attribution du marché par France compétences poursuit son cours et les lots ne leur seront définitivement alloués qu’après que deux dernières étapes auront été franchies :

  • la réception des pièces devant être transmises à France compétences par les opérateurs ayant reçu une information d’attribution provisoire, puis leur vérification par les services de l’institution nationale ;
  • l’extinction du délai de suspension (dit délai de stand still) prévu par le code des marchés publics pour permettre aux candidats non retenus d’engager, s’ils le souhaitent, une procédure de recours. L’article R.2182-1 du code de la commande publique prévoit que "pour les marchés passés selon une procédure formalisée, un délai minimal de onze jours est respecté entre la date d’envoi de la notification [d’attribution] et la date de signature du marché par l’acheteur". Un "délai minimal porté à seize jours lorsque cette notification n’a pas été transmise par voie électronique". Dans le cas du marché du CEP des actifs occupés pour la période 2024-2027, ce délai devrait arriver à échéance au cours de la deuxième semaine de novembre 2023.

15 LOTS ATTRIBUÉS SUR 16

Le marché passé par France compétences pour définir les nouveaux opérateurs du CEP des actifs occupés pour la période 2024-2027 comportait 16 lots : 14 lots régionaux et deux lots de sécurisation destinés à définir des opérateurs en capacité à se substituer à l’éventuelle défaillance d’un opérateur régional de manière à garantir la continuité de service du CEP pour les salariés et travailleurs indépendants.

Si les 14 lots régionaux ont bien été attribués (provisoirement dans l’attente que les conditions évoquées plus haut soient remplies), seul le lot de sécurisation pour la France métropolitaine a été attribué à deux groupements conduits par Talent Solutions Tingari (avec Catalys Conseil et ID Formation comme cotraitants) et par le cabinet de conseil RH Risesmart France (avec Randstad, Fastroad TT et l’IMT - Institut des métiers et des compétences, comme cotraitants). Le lot de sécurisation pour les Drom n’a en revanche reçu aucune offre, conduisant France compétences à le déclarer infructueux. Une solution devrait être trouvée dans les prochaines semaines. Cette situation est similaire à celle rencontrée lors du premier appel d’offres de France compétences sur le CEP, en 2019.

LARGE RECONDUCTION DES OPÉRATEURS DÉJÀ EN PLACE

Sur les 14 lots régionaux correspondant au nouveau paysage des opérateurs du CEP des actifs occupés qui se mettra en place à partir du 2 janvier 2024, 11 restent opérés par les mêmes attributaires principaux qui sont en place depuis 2019, un voit son attributaire s’associer à un nouvel acteur (en Grand Est) et les deux derniers lots, concernant les Outre-mer, font l’objet d’un nouveau découpage (1). De fait, les trois réseaux qui se partagent la délivrance du CEP pour les salariés et les travailleurs indépendants depuis 2020 restent en place, à savoir :

  • les CIBC, dans 6 régions : Aura, Bourgogne-Franche-Comté, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Paca-Corse et Grand Est, en association avec EESC SAS, la structure de formation supérieure et continue de la CCI de Meurthe-et-Moselle, dans cette dernière région. Le réseau des CIBC "gagne" une région métropolitaine (Grand Est) par rapport à la période précédente, par contre, il "perd" la Guadeloupe dont le marché a été regroupé avec les autres Drom antillais et Atlantique, ainsi que Mayotte (regroupé avec La Réunion). En outre, plusieurs CIBC intègrent en outre des consortiums portés par d’autres opérateurs et au sein desquels ils n’étaient pas présents jusqu’alors (Bretagne, Hauts-de-France, Normandie et Pays-de-la-Loire) ;
  • Talent Solutions Tingari, dans 3 régions : Centre-Val de Loire, Hauts-de-France et Île-de-France. Le périmètre d’intervention du cabinet de conseil en RH, qui a intégré ManpowerGroup en 2022 (lire sur AEF info), reste inchangé ;
  • Catalys Conseil, dans 3 régions : Bretagne, Normandie et Pays-de-la-Loire. Le périmètre d’intervention du "cabinet de conseil en stratégie, management des ressources humaines et évolution professionnelle" reste lui aussi inchangé.

Dans les Drom, malgré le redécoupage des lots proposé par France compétences, qui a regroupé les différents territoires en deux lots régionaux (2), les attributaires principaux du CEP des actifs en emploi, restent aussi en place :

  • Retravailler EGP, à La Réunion et Mayotte. Il est à noter que l’association Retravailler intervient seule sur ce lot du CEP. Elle est aussi cotraitantes au sein de plusieurs régions métropolitaines et était déjà chargée du CEP à La Réunion. L’Apifpam, le CIBC Océan indien, qui assurait le CEP à Mayotte n’interviendra pour sa part plus à partir de 2024 ;
  • Aksis SAS, à la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Le "cabinet de reclassement et conseil en évolution professionnelle" assurait déjà le CEP à la Martinique. Le CIBC qui assure ce service en Guadeloupe jusqu’à fin 2023, n’interviendra plus.

Bien qu’ils connaissent globalement une forte stabilité, les cotraitants qui vont assurer le service du CEP au côté des principaux attributaires de chaque lot régional, voient un certain nombre de nouveaux acteurs apparaître ou renforcer leur présence. Ainsi, on constate donc l’arrivée des CIBC dans plusieurs régions où ils n’étaient pas présents (Hauts-de-France, Pays-de-la-Loire, Normandie et Bretagne). De même, l’Éducation nationale intègre les rangs de l’opérateur du CEP en Occitanie (deux Greta et le GIP FCIP) et on peut remarquer l’arrivée de nouvelles CMAR dans trois régions (Corse, Normandie et Bretagne).

UN APPEL D’OFFRES CHAMBOULÉ

Avant de parvenir aux choix validés par le conseil d’administration de France compétences le 5 octobre, le marché 2024-2027 du CEP des actifs occupés a rencontré quelques difficultés d’ordre technique qui auraient pu entraîner du retard dans la prise de décision. Selon les informations recueillies par AEF info, l’institution nationale a été alertée par la direction des affaires juridiques des ministères sociaux, dans le courant du mois de mai, de risques de conflits d’intérêts liés d'une part à la nature de certains organismes ayant répondu au marché, et d'autre part au statut de ses administrateurs et des membres des Crefop, consultés pour avis sur le lot correspondant à leur territoire. Une alerte déclenchée en raison des jurisprudences administratives et pénales récentes en la matière qui ont poussé les pouvoirs publics à envisager "une interprétation particulièrement stricte des textes en matière de conflits d’intérêts et de prise illégale d’intérêts"

En conséquence, la procédure d’examen des dossiers a été révisée début juillet de manière à imposer le déport des administrateurs et membres des Crefop qui auraient pu être concernés par un soupçon de conflits d’intérêts ou de prise illégale d’intérêts. Fin août, chaque Crefop a reçu de la part de France compétences un courrier leur présentant la situation et, surtout, listant pour chaque dossier sur lesquels le Comité avait à se positionner, la liste des organisations devant se déporter (ne pas participer à l’examen des dossiers concernés). Les mêmes dispositions se sont appliquées au niveau des commissions et du conseil d’administration de France compétences. Ces déports ont tout autant concerné les partenaires sociaux (notamment en raison de la présence d’associations paritaires dans certains consortiums), l’État (notamment en raison de la présence de GIP de l’Éducation nationale) et les régions (du fait de leur implication au sein de certains CIBC ou associations candidatant sur plusieurs lots).

UNE PROCÉDURE DIFFICILEMENT PARTAGÉE

Les bureaux des Crefop doivent donc rendre un avis consultatif sur les offres retenues par France compétences pour assurer le CEP sur leur territoire régional. Toutefois, sur les 18 Crefop invités à se positionner, 11 n’ont pas rendu d’avis (sans pour autant que cela n’influe sur la validité de la procédure, selon les éléments transmis aux administrateurs de France compétences) et 7 se sont positionnés. Parmi ces derniers, quatre ont positionné les candidatures reçues de l’institution nationale dans le même ordre que celle-ci et trois ont émis un avis différent.

Des avis étudiés par les services de France compétences, mais dont les argumentaires n’ont finalement pas été jugés assez convaincants pour modifier les choix initiaux proposés par les services de l’institution nationale. Les différentes offres reçues ont fait l’objet d’études "sur la base d’une grille d’analyse fine afin de garantir que les appréciations portées et la comparaison entre les offres s’appuient sur des critères en tous points objectivés", comme l’a expliqué France compétences à ses administrateurs. Ces analyses ont par ailleurs porté "sur le critère prix (30 % de la note) et sur la valeur technique (70 % de la note)" des différents dossiers.

UN MARCHÉ ATTRAYANT

Pour les 16 lots de son marché 2024-2027 du CEP des actifs occupés, France compétences a reçu 49 dossiers de réponses, dont 47 qui ont été jugés recevables. Seul le lot relatif à la sécurisation du dispositif dans les Drom n’a reçu aucune offre. Pour le reste, excepté les deux lots ultramarins qui n’ont obtenu qu’une seule offre chacun, tous les autres lots régionaux ont reçu de deux (notamment en Bretagne et Bourgogne-Franche-Comté) à cinq offres (Aura, Centre-Val-de-Loire et Hauts-de-France).

Ces résultats semblent démontrer que ce marché du CEP des actifs occupés reste attractif pour un certain nombre d’acteurs. Pour rappel, les documents de présentation du marché estimaient l’enveloppe totale prévue pour le CEP des actifs occupés sur la période 2024-2027 à près de 365,4 M€. Un total lié aux estimations établies par France compétences pour les différentes UO (unités d’œuvre) du CEP des actifs occupés sur la période 2024-2027. Au total, ces estimations portent sur :

  • 1 182 966 entrées en "UO 0" ("aiguillage" des candidats) en quatre ans (avec une progression de +20 % par an des entrées) ;
  • 919 291 entrées en "UO 1" ("premier niveau de conseil personnalisé") avec le même objectif de +20 % par an ;
  • 368 088 entrées en "UO 2" ("accompagnement personnalisé").

(1) Comme c’est déjà le cas depuis le lancement du "nouveau CEP" prévu de la loi "Avenir professionnel" du 5 septembre 2018, les lots régionaux du conseil en évolution professionnelle des actifs occupés sont attribués à des consortiums d’acteurs se partageant les interventions territoriales (à l’exception de la zone Réunion-Mayotte où l’association Retravailler intervient seule). Chaque consortium est constitué d’un attributaire principal (sauf en Grand Est où ils sont deux) et de cotraitants à qui il "sous-traite" une partie de la réalisation du marché.

(2) D’une part "La Réunion et Mayotte" et, d’autre part, "la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélémy et Saint-Martin"